Livres
Le voyage pour mode de vie
Nourri, dès l’âge de raison, par la lecture des grands récits d’aventures, Nicolas Bouvier rêve très tôt de « déguerpir ». Ses premières escapades de jeunesse, qui le mènent de la Laponie au Sahara, puis ses incursions au long cours, toujours plus à l’est, forment un « usage du monde » qui lui est propre, une invitation à l’audace et à l’humilité. Véritable pionnier de la figure de l’écrivain-voyageur, il a restitué dans ses œuvres l’éclat de ses découvertes comme ses parts d’ombre, le naufrage de la solitude conjugué au déracinement.
De nombreuses illustrations agrémentent ce récit, émanant principalement du travail de photographe de l’écrivain-voyageur.
Nicolas Bouvier au gré des géographies d’Alexandre Chollier, éditions Paulsen, 39,90 €
Oh ! les belles affiches
L’histoire touristique du mont Blanc en 70 affiches iconiques. Le mythe du mont Blanc prend corps dès le xviiie siècle. La montagne voit sa renommée grandir au rythme des voyageurs, des alpinistes, des aventuriers et enfin des touristes qui prennent son chemin. Les besoins en publicité décuplent avec l’essor du tourisme. L’affiche illustrée va devenir l’un des porte-voix du mont Blanc. Fragile, éphémère, ne retenant le regard que quelques instants, l’affiche doit porter des images puissantes pour capter l’attention. Le mont Blanc est un sujet privilégié. Aucune montagne au monde – mis à part peut-être le Cervin – n’en compte autant à sa gloire. Le toit de l’Europe a été abordé de très diverses manières selon les pays : la France s’en glorifie, la Suisse (surtout Genève) regrette qu’il ne soit pas sur son territoire et cherche à se l’approprier iconographiquement, tandis que l’Italie ne le regarde qu’avec distance. Cette diversité unique montre à quel point ce sommet a fait et fait encore rêver depuis trois siècles.
Le Mont Blanc s’affiche ! de Jean-Claude Giroud, éditions Glénat, 35,95 €
Un Haut-Savoyard au service de Charles Quint
Un quai porte son nom au centre d’Annecy mais qui se souvient de qui était Eustache Chapuis ?
Humaniste brillant et admirateur d’Erasme, Eustache Chapuis, Savoyard né à Annecy, connut un destin exceptionnel. Après avoir joué un rôle politique important à Genève, il entra au service de Charles Quint, qui l’envoya à Londres pour défendre les intérêts de Catherine d’Aragon, le roi Henri VIII voulait divorcer. Il se montra un diplomate hors pair, devint l’ami de la reine déchue et s’opposa à la tyrannie royale. Il favorisa les tentatives de soulèvement, créa un service de renseignements particulièrement efficace, et entraîna l’Angleterre dans le grand duel qui opposait François 1er à l’Empereur.
Acteur essentiel de la diplomatie de son époque, il avait la confiance totale de Charles Quint, dont il il resta le principal correspondant tout au long de sa longue carrière, jalonnée d’intrigues et d’événements passionnants.
À la fin de sa vie, il consacra sa fortune à la fondation de deux collèges liés de manière originale, l’un dans sa ville natale Annecy et l’autre à Louvain en Belgique, où il s’était retiré. Il est considéré comme le bienfaiteur de la Savoie. Pour cet ouvrage, les auteurs on lu, traduit et compilé 752 lettres par et adressées à Eustache Chapuis. Cela en fait une étude des plus originales et la première étude globale consacrée à ce Savoyard illustre.
Eustache Chapuis 1492-1556, humaniste savoyard et diplomate de Pascal Durandard et Roland Hyacinthe, éditions de l’Asronome, 25 €
Une réédition pour un anti-héros de la grimpe
En août 1966, la France, qui vient d’enterrer Lionel Terray, découvre un nouveau visage de l’alpinisme. Il est immense, porte ses cheveux blonds en bataille et parle avec un charmant accent américain, de quoi faire les délices des journalistes. Lui, c’est Gary Hemming, propulsé du jour au lendemain au statut de héros pour l’audacieux sauvetage des Drus : Gary a mené une équipe de francs-tireurs de la grimpe au secours de deux Allemands bloqués en haut de la face ouest. Le Californien est le symbole d’une nouvelle façon de grimper, d’un nouveau style de vie, tendance LSD en dehors, et d’humour en bandoulière. Il meurt une nuit d’août 1969 dans une forêt du Yosemite, d’une balle dans la tête. « Suicide accidentel » conclura l’enquête. Un demi-siècle après sa mort, la réédition illustrée de la biographie de référence de Mirella Tenderini (parue en 1991) fait revivre cet anti-héros immortel. Le livre est augmenté de textes inédits de Gary Hemming et d’une préface de Pierre Mazeaud qui fut son ami.
Un héros beatnik. Vie et mort de Gary Hemming (1934-1969) de Mirella Tenderini, éditions Guérin, 56 €
Marcher et raconter
Pendant deux ans, Nil et Marie ont vécu une aventure épique. Ce n’est pas à l’autre bout de la planète qu’ils se sont lancés dans cette expédition, mais bien chez nous, sur ce continent que nous connaissons si peu, l’Europe : du Portugal à la Turquie, 10 000 km à pied par la haute route, celle des montagnes.
Au-delà de la performance, ce projet, tourné vers l’autre et profondément ancré dans une idée du voyage plus vert et responsable, a été conçu pour fédérer et inspirer. Le projet a d’ailleurs reçu le Haut patronage du Parlement européen pour ses dimensions culturelles et humaines.
Avant leur départ, Nil et Marie ont également monté 1 kg for the planet : ils ont initié la production de sacs de collecte de déchets, fabriqués à partir de bouteilles en plastique. Ces sacs, qu’ils ont distribués au fil du voyage, ils les ont utilisés pour ramasser les détritus abandonnés sur les milliers de kilomètres parcourus. À travers ce geste simple, ils ont tenté de sensibiliser petits et grands sur la pollution.
Ce livre relate ce voyage épique de deux ans, les nombreuses rencontres qu’il a engendrées, enrichi des multiples clichés de Nil, également photographe.
Deux pas vers l’autre, 10 000 km à pied pour raconter l’Europe de Nil Hoppenot et Marie Couderc, éditions Glénat, 25,95 €
Un roman où l’air se raréfie
Un jour d’hiver, le jeune Vadim, petit Parisien de douze ans, gamin des Batignolles, inquiet et asthmatique, est conduit par le train vers un air plus pur. Il ignore tout des gens qui vont l’héberger, quelque part dans un repli des hautes montagnes. Il est transi de fatigue quand, au sortir du wagon, puis d’un tunnel – l’avalanche a bloqué la voie – il foule la neige épaisse et pesante, met ses pas dans ceux d’un inconnu. Avance vers un endroit dont il ne sait rien. Ouvre bientôt les yeux sur un décor qui le sidère, archipel de sommets entre brume et nuages, hameau blotti sur un replat. Immensité enivrante qui le rend minuscule. Là, tout va commencer, il faudra apprendre : surmonter la séparation, passer de la stupeur à l’apprivoisement, de l’éblouissement à la connaissance. Confier sa vie à d’autres, à ceux qui accueillent et qui savent ce qui doit advenir.
Images et perceptions qui nous traversent comme autant d’émotions, nous élèvent vers ces ailleurs bouleversants, ces montagnes dont la démesure change et libère les hommes, et sauve un enfant.
L’île haute de Valentine Goby, éditions Actes Sud, 21,50 €
Il y a ceux qui construisent demain
101 initiatives de transition pour imaginer nos territoires montagneux de demain. Nos territoires de montagne tels que nous les connaissons sont aujourd’hui confrontés à des problématiques environnementales, sociétales et structurelles dont les enjeux pour le futur sont majeurs. Si rien ne change, leur avenir est clairement menacé. Mais rien n’est perdu. Chaque année, de nombreuses initiatives collectives citoyennes et institutionnelles voient le jour avec comme objectif de changer d’approche.
Ce recueil, composé de huit thématiques (habiter, se déplacer, s’équiper, s’alimenter, préserver, pérenniser, pratiquer, inclure, se cultiver), couvre l’ensemble de notre pays. Il rend visible et valorise des personnes et des organismes qui œuvrent au quotidien pour imaginer des voies de développement respectueuses de l’environnement pour porter la voix d’un modèle plus respectueux, pour repenser notre relation à la nature, pour recréer du lien entre les acteurs qui vivent en montagne et ceux qui en vivent.
Cet ouvrage engage à imaginer ensemble un futur désirable et de partir à la rencontre de ceux qui construisent des solutions pour mieux vivre la montagne de demain.
Demain, la montagne de Mathias Virilli et Sandy Plas, éditions Glénat, 25,95 €
N°163
Avril/Mai 2024
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